Je n'ai pas le don de parler

Je n’ai pas le don de parler décrit la lente guérison d’une communauté où la violence bégaie.
Habitées par des réminiscences de la Blanche-Neige de Robert Walser et par ses Petits Textes Poétiques, cinq figures se promènent dans des limbes suspendus entre conte et théâtre, vie et mort, douceur et sadisme – réalité et merveille.

La fable présente toujours les mêmes contours : la Reine jalouse a tenté par tous les moyens possibles de tuer la belle jeune fille. La suite, c’est ici le trou laissé par un meurtre qui n’a pas eu lieu et dont Blanche-Neige sort à la fois indemne et meurtrie. De retour à la cour, elle vient sommer la reine impunie de faire lumière sur cette « injustice à la nuque raide ».
De retournements en révolutions, la pièce va creuser l’ambiguïté des désirs, et donner jour à une nouvelle morale, celle du « doux sentiment ». La lutte, le jugement, l’oubli et la mémoire seront ici autant de bricolages précaires pour (re-)construire un récit en commun. En chemin, le soupçon pèsera non seulement sur la possibilité du pardon (est-ce une révision ou une guérison ?), sur la nature du pouvoir et des affects mais aussi sur le théâtre lui-même : n’est-ce pas la même partition qui se donne sans cesse ici ? Où commence le jeu et où finit-il ?
Confiées sans apartés au public, les petites proses poétiques viendront trouer et inquiéter ce drame, mettant en jeu le désir violent d’une adresse, la recherche éperdue d’un lecteur ou d’un spectateur enfin frère ou sœur. Ainsi émerge le souhait d’une vie plus grande que la vie même. Comme une effraction de l’enfance dans tous les ordres – sociétaux, langagiers, familiaux – qui se font et se défont en nous.

Je n’ai pas le don de parler dessine un théâtre de peu, où les paroles et les gestes se bâtissent à vue, un théâtre si ténu qu’un courant d’air pourrait le faire vaciller, laissant pour morte l’histoire déjà écrite.